Carnet de bord de Raphaëlle
Août 2014
Contrairement au carnet principal, les archives se lisent de haut en bas...
Rose Island, Bahamas
2 août
La dépression que nous surveillons depuis plusieurs jours a pris forme. Ce n’est finalement qu’une tempête tropicale nommée Bertha. Les vents sont toutefois de 40 nœuds et elle s’accompagne de trombe d’eau. Elle ne devrait pas nous passer dessus, elle est censée tourner vers le nord puis vers le nord-ouest. Pour nous, qui n’avons encore jamais connu de tempête et encore moins d’ouragan, la nouvelle est inquiétante. D’après nos recherches, Eleuthera n’offre pas de vrais trous à ouragan et nous avons peur que celui au nord des Exumas soit bondé. Nous décidons donc de partir pour Rose Islande, à 5 miles de notre position, dans le trou que notre demi-compatriote nous a indiqué. Là encore, nous craignons de ne plus avoir de place, nous partons donc tôt. J’ai hâte de quitter Nassau. J’ai beau m’y sentir bien, ça reste une ville. Je suis décidément une fille des champs. Je ne m’ennuie ni des restaurants, ni des salles de spectacles, ni des musées, mais des grands espaces, des animaux en liberté et des beaux paysages.
Arrivée devant la passe, un gros grain s’abat sur nous, avec des vents de 25 nœuds. Notre sage capitaine décide de faire des ronds dans l’eau avant de s’engager. La passe est étroite, bordée de falaise des deux bords, envahie par les vagues. Après le grain, le vent diminue de moitié. Jacques pilote comme un pro, tandis que je cours de droite à gauche m’apprêtant à mettre un pare-battage en cas de collision. La
bouée restera sur le pont.
Le chenal qui entoure l’îlot enchâssé dans l’île a de toute évidence été creusé par l’homme. Nous découvrons une maison et quelques quais, placardés d’avertissement de propriété privée. Nous choisissons de nous amarrer contre la mangrove, hors de vu des installations humaines, à un endroit où le chenal est suffisamment large pour que nous ne bloquions pas le passage. Nous découvrons un nid dans la mangrove, à environ 50 cm du bateau, au niveau du pont. Deux oisillons nous regardent, étonnés. La mère nous guette pour profiter de la moindre de notre absence du cockpit pour s’occuper d’eux.
Nous marchons sur un chemin de sable, en quête d’un passage vers la plage au nord de l’île. Gaétan, comme d’habitude, me tient la main, à mon grand bonheur. Sylvain refuse presque toujours de me donner la sienne, même lorsque je marche seule avec lui, sauf s’il est fatigué. Un effet secondaire de ses 10 ans? Depuis que nous avons fixé la date de notre départ à l’été 2014, nous étions persuadés que Sylvain et Gaétan auraient l’âge idéal pour ce voyage. Idéal, car suffisamment indépendant. Idéal, pour que nous profitions d’eux avant les tempêtes de l’adolescence. Nous sommes partis depuis un peu plus d’un mois et notre analyse nous semble tout à fait juste. Accompagner les enfants à pied à l’école nous a toujours paru être un privilège. Jacques le faisait presque tous les jours, moi une fois par semaine. Marcher en se donnant la main est propice au dialogue. Le chemin offre presque toujours des sujets de conversation. Parfois, nous chantons.
3 août
Bertha devrait se faire sentir en soirée, elle file plus à l’ouest, mais il y a une veille de tempête sur Nassau. À nos amarres, nous ajoutons les deux ancres, une à l’avant et l’autre à l’arrière, pour limiter les mouvements vers le bord. Avec ses cordages aux 4 coins, le Chantemer est littéralement écartelé. En soirée, deux ou trois petits bateaux de pêche sportive rentrent dans le trou. Personne ne nous fait sentir que nous ne devrions pas être là. Les bateaux disparaissent derrière l’île intérieure.
Nous nageons jusqu’à la passe. Comme d’habitude, Sylvain tient la main de son père. Ils me font penser à un baleineau nageant contre sa mère qui la protège. Ces deux-là ont toujours eu une relation spéciale. Quand je dis toujours, je veux dire depuis la naissance de Sylvain. Jacques a eu droit à ses premiers sourires, c’est aussi lui que Sylvain appelait lorsqu’il se réveillait la nuit. C’est l’exemple parfait pour démontrer que l’allaitement n’enlève rien au père. Je leur souhaite de toujours conserver cette complicité, cette intimité.
4 août
Bertha a disparu sans nous dire bonjour. Nous ne lui en voulons pas. Le vent souffle pas mal, mais c’est loin d’être une tempête et nous sommes bien abrités. Il y a un grand ciel bleu.
Sur le bateau le temps file très vite. Nous avons souvent l’impression de n’avoir rien fait de la journée, tout en nous occupant constamment. Nous nous levons pourtant avec le soleil, avant 7 h, et nous ne sommes jamais au lit avant 21 h 30, nous nous accordons alors un petit temps de lecture avant de fermer les yeux. Les obligations sont nombreuses, même s’il y a peu de corvées en tant que telles. Tout prend du temps : faire à manger, ranger ce qui traîne, faire la vaisselle, étendre les maillots et les serviettes, vider les poissons, ré-étendre les maillots et les serviettes, faire le pain, essayer de comprendre pourquoi les batteries ne fonctionnent pas, ranger ce qui n’a pas encore été rangé depuis le départ, écouter les garçons, écouter Jacques râler après le bateau, faire de nouveaux essais sur l’alternateur moteur, regarder ce que Sylvain et Gaétan nous montrent, écouter Jacques râler après le vent (qui n’est jamais du bon bord ni de la bonne force au bon moment), essayer de nous connecter à internet, lever les filets des poissons, nous reconnecter à internet, écrire mon carnet de bord, tirer les vers du nez de Sylvain et Gaétan pour qu’ils me dictent le leur, trier les photos, traiter les photos pour le site, etc.
Eleuthera, Bahamas
5 août, vers Eleuthera
À la voile, la route la plus courte est rarement la ligne droite. Nous avions décidés de ne pas visiter Eleuthera, jouissant d’une moins grande réputation que les Exumas. Il ne reste que 3 semaines avant notre rendez-vous à Georgetown (dans le bas des Exumas) avec Jean-Pierre, le capitaine du dernier convoyage de Jacques. Mais voilà, après 8 jours à Nassau et 3 jours dans un trou, nous avons la bougeotte. Le vent vient exactement des Exumas pour les 3 jours à venir. Un détour par Eleuthera devrait nous permettre de l’avoir de côté, direction idéale, pour les deux traversées. D’accord, nous triplons presque le trajet en distance, et il prendra deux jours au lieu d’un seul. Et alors? Nous préférons naviguer à la voile durant deux jours, nous ancrer pour la nuit, que rester deux jours de plus à Rose Islande. C’est joli, mais il n’y a pas grand-chose à faire.
Jacques assure comme un vrai capitaine pour sortir de la passe. C’est vraiment impressionnant. Le vent est fort, 23-24 nœuds, les vagues en pleine face.
Me voilà coucher sur le dos, au fond des cabines, pour ouvrir la vanne d’eau noire. Nous étions vraiment dans un trou, nous avons donc préféré ne pas y déverser nos toilettes. Les vannes sont vraiment dures, la position inconfortable, l’odeur désagréable, sans parler des vagues. Burp... Je ne me sens pas bien. Pour la première fois depuis notre départ j’ai le mal de mer. Une petite sieste sur le trampoline me remettra vite d’aplomb. Une vague plus forte que les autres me tombe par dessus depuis l’arrière du trampoline, elle a dû ricocher sur le dessous de la nacelle. Je me lève et une autre vague me lave le visage alors que je suis encore accroupie, celle-là est passée par dessus bord. Je suis en maillot, il fait chaud, je rie. Une fois de plus je me sens hors du temps, passé et à venir. Je suis pleinement dans le moment présent, prenant la vie une vague après l’autre, les oreilles pleines du bruit du vent. Heureuse. Profondément heureuse. Intensément heureuse.
6 août, Rainbow Bay
Eleuthera est vraiment différente de ce que nous avons vu. Le sable n’a pas la même couleur, gris sous une fine couche plus rousse, et elle est trouble. Les poissons sont rares et sans intérêts. Il y a de jolies maisons tout au long de l’île, assez espacées. Les grandes plages, dont celles de sable rose, sont de l’autre côté de cette île aux dimensions respectables, difficilement accessibles en bateau. Sur la côte est, seuls deux ancrages sont indiqués, à l’extrême sud et nord de l’île. Nous ancrons cependant devant une belle plage, proche d’une presqu’île séparant les eaux turquoises de celles, plus profondes, outremers.
7 août
Rainbow Bay
Petite baignade matinale avant le départ vers Governor’s Harbourg. Le fond est quelconque, mais peu importe. Je m’approche d’une patate de corail, il y a souvent des poissons, des vers et d’autres êtres vivants non identifiés qui sont intéressants à regarder. Qu’est-ce que c’est que ça, des antennes? Mais oui! C’est une langouste! Sa cache est exactement comme je la visualisais. La pêche est ouverte depuis le 1er août. J’appelle Jacques qui va chercher son harpon bahamien. Je remets la tête dans l’eau, pour vérifier que je n’ai pas dérivé. Hiiii, un énorme baracouda me regarde! Jacques, vite!!! Le poisson curieux aura déguerpi avant l’arrivée du pêcheur. Jacques repère sa proie, plonge, tire et retire le crustacé avec une facilité... inattendue. Je devrais dire la carcasse de crustacé... Pauvre Jacques! Il mettra des heures à récupérer de son mal d’oreille (il est très sensible à la compression). J’éclate de rire, mais je suis aussi responsable que lui de cette mésaventure.
Governor’s Harbour
Arrêt en ville, cela veut dire chasse aux poubelles, épicerie, lessive, recherche d’un accès internet. Notre adaptateur WiFi mobile, qui nous a demandé tant d’effort à Nassau, nous permet de prendre nos courriels et de surfer sur le net presque en tout temps. Par contre, malgré plusieurs heures d’essai, je ne suis toujours pas capable d’entrer sur le FTP du site web et donc de le mettre à jour. Avant de relancer notre hébergeur, je dois vérifier si je suis capable de me connecter avec un accès terrestre. Nous nous rendons donc à la bibliothèque municipale, comme indiqué par le bureau du tourisme. 5 $ pour une heure de connexion??? Avons-nous le choix? Je paye. Impossible de se connecter, que ce soit par l’ordinateur ou par la tablette, ce n’est donc pas un problème de configuration ou de Windows 8, le mot de passe ne doit pas être bon. La bibliothécaire ne comprend pas d’où vient le problème, me rend mes 5 $. Depuis notre départ de Floride, la quête de connexion nous a volé des heures incalculables. Même quand nous sommes prêts à payer (c’est au moins la 3e fois), nous n’arrivons pas à nous connecter. C’est désespérant, décourageant. La motivation à écrire les carnets en a pris un coup.
8 août, Governor's Harbour
L’ancienne capitale des Bahamas me déçoit. De nombreuses maisons sont abandonnées, en ruines. Seule la bibliothèque offre un intérêt. Coqs, poules et poussins courent en tous sens et en toute liberté. Il n’y a aucune activité indiquant le marché aux poissons indiqué la veille par le bureau du tourisme.
9 août, vers Rock Sound
Nous ne sommes pas encore sortis de la baie que les gars attrapent coup sur coup deux petites carangues. Depuis les Mahi-Mahi, nous n’avons rien attrapé à part une minuscule carangue la veille. Un peu plus tard, ils attrapent un puis deux maquereaux de bonne taille. Je ne peux pas expliquer le bonheur trivial que je ressens lorsque je vide un poisson et en coupe les filets, assise sur les marches du bateau. La seule explication que j’y trouve est la satisfaction de survenir à notre besoin élémentaire de manger, un peu comme la satisfaction de manger les légumes de son jardin, mais en beaucoup plus intense. Qui m’a légué ce plaisir? Il me semble que mes ancêtres bretons n’étaient pas pêcheurs. Le poisson est notre principale source de protéine. À défaut, nous avons toujours une bonne réserve d’œufs. La viande est rare et chère, notre frigo incertain et le congélateur n’est pas assez froid pour y faire des glaçons. Nous en avons un peu en boîtes ou en conserves maison, en réserve.
Si je prends un réel plaisir à préparer les poissons, les trois hommes du bord prennent un plaisir évident à les pêcher. Sylvain, pêcheur dans l’âme, est le premier à courir dès qu’il entend le bruit d’une ligne qui se dévide. C’est également lui qui demande à mettre les lignes à l’eau, dès que nous changeons de mouillage. Nous avons donc du plaisir à pêcher, à préparer le poisson, mais surtout à le manger : en sushis, au barbecue, en croquette, sauté avec du riz, avec de la mayonnaise dans une tortilla, en terrine, etc.
10 août, Rock Sound
Nous avons passé la nuit à l’autre bout de la baie. S’isoler permet de se mettre nu. Se tenir loin du passage des bateaux permet de s’éloigner de la rive et donc des moustiques. C’est dimanche, tout est fermé. Nous attendons le vent annoncé pour le lendemain pour nous rendre au nord des Exumas. Jacques veut tester sa planche de surf, tiré par l’annexe. Notre moteur hors-bord de 15 chevaux, surdimensionné par rapport aux dimensions de la barque, devrait y arriver. Nous arrivons à convaincre Sylvain de prendre la barre. Gaétan monte également à bord. Après quelques essais, j’entends le moteur gronder anormalement. Il se soulève par à-coup et l’embarcation fait des embardées. Impuissante, je vois Gaétan passer par-dessus le bord avant... Sylvain réagit rapidement, il retire la sécurité et le moteur s’arrête. Jacques nage vers l’annexe, Sylvain aide son frère à remonter. Visiblement, tout le monde est sain et sauf. Jacques reprend les commandes et ils reviennent au Chantemer.
Contrairement aux garçons, je n’ai encore jamais conduit l’annexe, même si je connais le principe et me sens capable de le faire en cas de besoin. Je n’ai jamais été attirée par les engins à moteur. J’ai encore en mémoire le long apprentissage pour conduire ma première moto, à 14 ans, puis mes premières leçons pour mon permis de conduire... Jacques était proche d’arriver à se tenir sur la planche et je ne veux pas le laisser sur un échec. Je me propose donc de conduire l’annexe. Les gars, encore sous le choc, restent à bord du Chantemer. Conduire un hors-bord en tirant une charge n’est pas évident. Le bateau se dresse à 45°, me bouchant la vue. Heureusement, nous sommes loin de tout obstacle. Enfin le bateau déjauge et retrouve une position plus horizontale. Jacques surfe et y prend visiblement beaucoup de plaisir. Moi, je suis accroupie sur le fond rigide de la barque, un œil sur Jacques et l’autre vers l’avant, concentrée sur les commandes du moteur (direction et vitesse), encaissant les coups dus aux vagues, subissant le vacarme du moteur. Je n’ai aucun plaisir, bien au contraire. Après quelques minutes, je rentre au Chantemer. Jacques est heureux, il a aimé les sensations du surf, il a hâte d’en faire tirer par un kite. Comme le bonheur est contagieux, je suis heureuse de lui avoir offert cette expérience. Il faudra que je montre à Sylvain comment conduire l’annexe dans ces conditions, s’il faut accélérer ou ralentir me parait une évidence, je n’ai donc pas besoin de lire les consignes de Jacques en gestes incertains. Se relayer à la barre et au surf est logique. Je n’ai aucune intention de faire du surf et mon abnégation de mère et d’épouse a des limites.
En fin d’après-midi, nous allons visiter l’Ocean Hole, le trou bleu local, presque au centre de la ville de Rock Sound. Il est nettement moins impressionnant que celui que nous avons vu dans les Berry, peut-être parce que la végétation autour est moins sauvage. Peut-être à cause de l’accès en béton et de la vingtaine de Bahamiens qui y sont agglutinés. Après avoir fait le tour à la nage, nous nous asseyons quelques minutes sur les marches, au milieu de ces jeunes qui s’amusent. Il n’y a que deux ou trois adultes, le reste est des enfants, dont le plus jeune doit avoir deux ans et réclame sans arrêt à sa mère de le plonger dans l’eau, bien au-dessus de sa tête. Les ados gars sautent ou plongent du parapet en arrière de nous. Je n’ose imaginer ce que Martin ferait s’il était avec nous... C’est dimanche, il fait beau et il n’y a pas de moustiques. Le bonheur qui se dégage de ces gens est contagieux, nous nous sentons bien. Je n’ai ni le sentiment d’être incorporée dans le groupe ni celui de les géner. Nous sommes acceptés, voilà tout. Une fille aborde Gaétan, mais la barrière de la langue rendra vaine sa tentative.
Exumas, Bahamas
11 août, vers Allens Cay
Il fait beau, le vent un peu faible, mais sur le travers et la mer est relativement calme. Une traversée de routine pour nous. C’est fou comme la routine s’installe vite, mais aussi comme elle peut être rassurante. Sylvain et Gaétan se sont coulés dans cette vie avec facilité. Je me rends compte à quel point nous les avons préparés à cette vie. Je me rends également compte de la chance que nous avons de les avoir, comme leur complémentarité et leur complicité est une clef importante dans le bon déroulement de ce voyage familial.
La routine d’une traversée c’est tout d’abord Jacques qui tient la barre le plus souvent. Tenir la barre étant un bien grand mot lorsque nous sommes en pleine mer, sans autre bateau, et que le pilote automatique tient le cap tout seul. Il reste assis sur la banquette du capitaine, le regard au large et à la fois si présent. Sylvain met les lignes à l’eau, vérifie souvent les cannes à pêche, enlève les algues et démêle les lignes au besoin. Le reste du temps, il est assis sur le siège de la pointe avant avec un gilet de sauvetage si le bateau bouge trop. Gaétan dort souvent, il est plus sensible au mal de mer. Moi je m’occupe, prépare à manger (nous grignotons à plusieurs reprises plutôt que de faire un vrai repas), lis, rédige mon carnet de bord (ce sont les journées où j’ai le plus de temps), m’assois à côté de mon amoureux. Dans l’après-midi, les garçons regardent un film.
Nous arrivons en fin d’après-midi. Le paysage est vraiment beau. L’eau est si transparente que sa profondeur apparente est trompeuse. Par contre, il y a beaucoup de courant de marée. Nous abordons, à la nage, une des îles à iguanes. Il y en a plusieurs qui nous regardent. Alors que je m’avance vers eux, le plus gros d’entre eux court au-devant de moi. J’ai peur et je cours à mon tour me réfugier derrière Jacques. « Est-ce que ça nage, les iguanes? » Je ne suis vraisemblablement pas proche de son nid, je ne suis pas sa nourriture, alors pourquoi a-t-il git ainsi? « Pour voir si tu vas lui donner à manger... » Bien sûr, Jacques à raison. Nous sommes sur un des cays les plus visités des Bahamas, reconnu pour la présence des iguanes. C’est bien connu, un des (nombreux) problèmes lorsque l’on donne à manger à des animaux sauvages, c’est qu’ils risquent de harceler tous les humains qu’ils voient en réclamant à manger.
12 août, Allens Cay
Jacques a sorti un des kayaks gonflables. Je n’arrive pas à analyser ce qui m’a retenue jusqu’ici de descendre le mien. La peur des courants et des vents? Le manque de temps? La peur d’avoir mal à l’épaule? La chaleur? Les garçons s’amusent comme des fous et se débrouillent plutôt bien. Le kayak a beaucoup moins de prise au courant que les nageurs. Je l’essaie à mon tour, mais je trouve que la position est inconfortable et qu’il est très difficile à manier. Du coup, j’ai très envie de sortir le mien.
13 août
Highbourne Cay
Jacques revient d’une énième tentative de kite. Il est furieux, s’en prend à nous qui soi-disant refusons toujours de l’aider (il n’a rien demandé ce matin), argue qu’il serait mieux chez nous, qu’il y ferait du kite beaucoup plus souvent, etc., etc. J’explose. Probablement que je râle presque aussi souvent que lui, même si ce n’est pas pour les mêmes choses ni de la même manière. Si je lui envie la facilité avec laquelle il évacue sa frustration, il ne réalise pas à quel point c’est nous qui récoltons toutes les ondes négatives qu’il dégage. Nous l’aimons trop pour que ces ondes glissent sur nous, elles nous percutent de plein fouet et le bateau est trop petit pour que nous puissions y échapper. J’explose : « Eh ben, rentrons!!! » Les mots sont sortis sous le coup de la colère, du désarroi, mais je ne les pense pas, je ne les pense plus. Plus du tout. Je n’ai aucune envie de rentrer, mais vraiment aucune. Je le lui dirais plus tard, lorsqu’il sera calmé.
Il fait une chaleur suffocante. Pas de changement au thermomètre, il fait 29 °C tous les jours, à n’importe quelle heure du jour et de la nuit. Malgré le vent, j’ai l’impression d’étouffer. L’air est épais, on peut presque le toucher, comme s’il était saturé d’eau. Nous attendons la pluie, pour rincer le bateau et remplir les réservoirs, elle ne viendra pas. Alors qu’il pleuvait presque tous les jours jusqu’à ce que nous quittions les Berry, fin juillet, nous n’avons eu que quelques averses à Nassau puis une nuit de grosse pluie à Rose Island. Rien depuis...
Highbourne Cay est une des nombreuses iles privées. Comme les panneaux le demandent sur la plage, nous allons faire un tour au bureau de la marina. Tout le nord de l’ile nous est interdit. Dommage, une vraie balade à pied m’aurait bien dit. Nous achetons des tomates et des bananes. Je ne comprends toujours pas pourquoi il y a si peu de fruits frais. Les seuls fruits abordables sont les bananes... et les pommes! Au retour nous nous arrêtons dans une petite crique, avec une plage qui donne dans la direction du vent. Nous nous y arrêtons pour jouer dans les vagues.
Normans Cay
Je nage dans un avion... La carcasse est plus grosse que ce à quoi je m’attendais. Malgré 30 ans passés dans la mer, elle est relativement bien conservée. La diversité des coraux qui recouvrent la coque par endroit est impressionnante, de même que la quantité de poisson qui viennent nous tourner au tour. Ha c’est pour ça! Un groupe de touristes, amenés par un bateau d’excursion, balance des granulés pour poissons qui viennent leur
manger dans les mains.
Au retour, le fameux ilot à l’unique cocotier est libre. C’est marée basse, l’endroit est magique. Un banc est installé au pied du cocotier, vers le soleil couchant, avec une inscription « From (?) who love these islands ». Merci
14 août
Normans Cay
Nous retournons à l’épave, en partie pour essayer d’attraper le gros mérou que nous avons vu la veille. Nous entrerons bientôt dans le parc national ou toute pêche est interdite. Le mérou ne se montre pas, mais il y a une énorme raie! Trop grosse pour être mangée. Nous faisons ensuite un grand tour d’annexe dans la baie. C’est magnifique, j’ai rarement vu d’endroits aussi beaux. L’eau est transparente, les couleurs sont magiques.
Shroud Cay, Exuma Land and Sea Park
Ça y est! Je sors mon kayak. Comme Sylvain et Gaétan veulent également venir, nous montons le deuxième kayak gonflable. Gaétan montera derrière Jacques tandis que Sylvain s’accrochera à moi. Ils échangeront leur place au retour. La ballade est parfaite. Il n’y a pas un souffle de vent, c’est le calme plat. Le soleil bas sur l’horizon offre une lumière magnifique sur la mangrove. La faim et les moustiques nous incitent à faire demi-tour. Soudain, des hurlements de loups! D’accord, ce sont des chiens, pas des loups, mais ils hurlent à la mort. Que font deux chiens sur une île déserte? Il me semblait qu’il n’y avait pas de maison ici. Sont-ils en liberté? Les hurlements se rapprochent, j’accélère. La mangrove qui borde le passage est-elle assez inextricable pour empêcher les chiens de passer? Quelque temps après notre retour au bateau, deux chiens, aboyant comme des fous, apparaissent sur la falaise. Heureusement que nous sommes trop loin pour qu’ils viennent à la nage jusqu’au bateau, de toute façon ils n’arriveraient pas à monter à bord. Ils aboieront jusqu’au milieu de la nuit.
15 août
Shroud Cay, Exuma Land and Sea Park
« Ahououououou... » Les loups, euh, les chiens, sont de retour. Il est 8 h. Les hurlements se transforment petit à petit en aboiements plus conventionnels. Jacques, Syvlain et moi allons visiter en kayac une petite île un peu plus loin. « Private property ». Nous échouons quand même les kayacs sur la plage et nous pataugeons tranquillement dans l’eau peu profonde. Soudain, les chiens surgissent! Ils n’aboient pas, nous regardent à peine et se dirigent vers la maison au bout de la plage. Mais comment ont-ils fait pour parcourir une telle distance en si peu de temps? Pour ne pas nager dans l’eau profonde avec pas mal de courant, ils ont dû faire un détour énorme. Aucun doute, ce sont les mêmes chiens. Jacques, moins paniqué que moi, va courageusement chercher les kayacs. Les chiens ne se mettront à aboyer que lorsque nous partirons, ils n’essaieront pas de nous suivre. Drôle de comportement.
Hawksbill Cay, Exuma Land and Sea Park
Nous décidons de nous amarrer à une des bouées mises à la disposition par le parc pour ménager les fonds marins. C’est notre première manœuvre de ce genre. Jacques dirige le bateau avec une précision chirurgicale, il a pris de la bouteille, cela ne fait aucun doute. De mon côté, j’attrape l’anneau avec la gaffe du premier coup et j’y accroche la patte d’oie en quelques secondes. Manœuvre parfaitement réussie du premier coup, nous étions bien préparés.
Nous profitons de l’étale de courant de marée pour visiter un rocher proche de l’océan. Il y a tellement de coraux différents, la densité et la variété de poisson sont si grandes, que nous avons l’impression de nager dans un aquarium. Nous découvrons même une énorme langouste, bien cachée dans son trou (et vivante). Nous sommes dans un parc, toute pêche et cueillette est interdite, même pour les coquillages vides. Dommage...
16 août, Exuma Land and Sea Park
Hawksbill Cay
Jacques kite. Il fait des aller-retour dans l’immense baie, saute, vire. Il kite, enfin! Je l’ai aidé à décoller et tout s’est bien passé. Sylvain et moi lisons sur la plage en l’attendant, Gaétan est resté dans le Chantemer. Un coup de sifflet attire mon attention, il veut atterrir. Je cours, j’attrape le kite et le pose, dans le bon sens, pour une fois. La séance a été courte, Jacques s’est arrêté avant que le vent faiblisse trop, mais, je le sens, elle a été réparatrice. Pour nous tous.
Vient le moment de larguer la bouée. La patte d’oie est emmêlée autour du cordage, l’accroche rapide a souffert de la tension excessive. La veille, j’avais dû démêler sous l’eau la petite corde que nous avions passée dans la patte d’oie pour pouvoir la ramener facilement au puits d’ancre. Notre manœuvre était réussie, sauf que nous n’aurions pas dû nous accrocher par la patte-d’oie mais par une amarre fixée sur les taquets à l’avant. Nous ferons mieux la prochaine fois.
Warderick Wells Cay
Un jardin! Je nage dans un jardin! Tout est parfaitement à sa place, même les poissons. Un paysagiste n’aurait pas fait mieux. Non, un humain n’aurait pas pu faire aussi harmonieux. Les poissons et les langoustes jardinent sans relâche cet ensemble de coraux, d’éponges, de gorgones, etc. Dans ce coin-ci, cela ressemble plutôt à un village où les patates de corail sont des maisons dispersées avec bonheur. Maisons? Je devrais dire immeubles, vu le nombre impressionnant d’habitants. Certaines espèces, en particulier les poissons-anges et les poissons-perroquets, nous impressionnent par leur taille. Voilà ce que ça donne lorsque l’homme ne pêche plus et laisse les poissons atteindre leur taille adulte. Nous apercevons également une raie gigantesque et une tortue de mer. Pour que le tableau soit complet, il manque juste un barracuda et un requin, mais nous ne nous en plaignons pas.
De retour au Chantemer. Le soleil vient de se coucher, c’est l’heure de faire à manger. Un gros requin-nourrice vient lentement tournoyer à l’arrière du bateau, se repose un peu dans le fond puis recommence sa ronde. Je suis convaincue qu’il attend nos déchets comestibles, mais il attendra en vain.
17 août, Warderick Wells Cay, Exuma Land and Sea Park
Libérée. C’est ainsi que je me sens, libérée. De quoi? Je n’en sais rien et ce n’est pas ça l’important. L’important est le moment présent. Je suis au sommet de la colline Boo-Boo. J’embrasse du regard l’océan, les îles, les plages, la nature, les couleurs... Mon existence est insignifiante face à tout cela et c’est très bien. Tout à coup, le désir de pouvoir de certains, celui de laisser leur trace avant de mourir pour d’autres, me paraît vain. Je regarde le tas de planches, peintes ou gravées de noms de bateaux et de dates, déposées par des
navigateurs en visite, et cela me fait sourire. Probablement que si nous reprenions ce chemin, nous laisserions nous aussi une trace du Chantemer, de notre passage. La vie est faite de compromis et de contradiction, c’est ce qui la rend si intéressante. Je vous dois un aveu, Jacques, Gaétan et moi sommes en train de lire (ou de relire) tous les livres de Pierre Bottero liés à Gwendalavir. Ce sont des romans de fiction pour adolescents, mais ils sont emprunts de réflexions profondes sur la vie, sur le pouvoir et sur ce qu’on en fait. Notre voyage nous insuffle une grande ouverture d’esprit, une remise en question profonde de nos valeurs, ce qui nous rend particulièrement réceptifs à l’importance du cheminement et de la progression, à l’évidence que l’arrivée est une fin et non un aboutissement. À l’harmonie aussi, si difficile à trouver, si difficile à s’y intégrer. J’ai également laissé ma trace, mes traces. Mes quatre enfants qui ne portent pas mon nom, c’était mon choix et je ne l’ai jamais remis en question. J’ai aussi la prétention d’avoir laissé ma trace à Nourri-Source, au Mouvement allaitement du Québec et au Regroupement Les Sages-femmes du Québec. Peu à peu mon nom s’efface de ces traces-là et c’est très bien. Ce que j’ai donné c’était pour les femmes et pour apporter ma contribution à faire évoluer une société, mais en aucun cas pour ma gloire personnelle.
Le premier acte libératoire fut la coupe de cheveux. Plus que symbolique, ça a été une libération physique. Depuis mes 10 ans, j’ai rarement eu les cheveux courts, et jamais si courts. La raison principale est parce qu’ils poussent très vite, et donc que, pour les garder courts, il faudrait que j’aille chez le coiffeur une fois par mois. Je n’en ai jamais pris les moyens, ni en temps ni en finance. Avoir les cheveux très courts, c’est ne plus avoir à se coiffer le matin. C’est se laver les cheveux en quelques minutes et les rincer du premier jet. C’est avoir moins chaud à la tête. C’est ressortir de l’eau sans avoir une cascade qui coule sur les yeux. En aucun cas, ce n’est une perte de féminité.
Le deuxième acte libératoire fut ma démission. J’aimais énormément les personnes avec qui je travaillais. J’ai défendu la cause des sages-femmes avec toutes mes convictions, mais la routine « métro-boulot-dodo » me pesait. En trois ans, je ne me suis pas vraiment réhabituée à aller au bureau, j’ai toujours gardé la nostalgie du travail à domicile. Et pourtant, j’avais d’excellentes conditions, un travail de 4 jours par semaine et une souplesse dans les horaires que bien des personnes m’enviaient, avec raison. Ce n’est pas le temps de penser à mon avenir professionnel, c’est le temps de me libérer.
Le troisième acte libératoire fut d’enlever mes alliances. L’excuse étant la peur qu’elles se prennent dans les cordages et la peur d’attiser la convoitise de gens mal intentionnés. La peur de les perdre, si je devais les enlever dans le bateau. Elles étaient si fines... C’est plus facile de trouver des raisons rationnelles que d’analyser nos envies profondes. L’amour que je partage avec Jacques est bien plus fort qu’une note sur un registre d’état civil. Je ne suis pas avec lui parce que nous sommes mariés ou que nous avons quatre enfants. Je suis avec lui parce que je l’aime, pas parce que j’ai une alliance au doigt. Je suis avec lui chaque seconde ou presque, je n’ai pas besoin d’un anneau pour me le rappeler. Je n’ai pas besoin d’un symbole pour montrer aux autres que mon cœur est déjà pris. MES alliances? Oui, j’en ai deux. La première est celle que Jacques m’a passée au doigt, Martin avait quelques mois. La deuxième est celle de Grand-Maman Chenal. Lorsque nous nous sommes mariés, Jacques avait le désir d’utiliser la bague de son grand-père. Sa grand-mère a devancé ce désir en la lui offrant. Nous avons ajouté notre date de mariage, sans effacer l’ancienne. Depuis sa mort, je portais l’alliance de Grand-Maman au petit doigt, elle était bien trop menue pour aller ailleurs. Pour moi, elle est l’âme sœur de l’anneau que Jacques porte, le véritable symbole de notre amour. Lorsque j’ai réalisé que le mariage symbolise le passage de l’autorité du père à celle du mari, cette tradition a perdu son prestige. Je m’explique. Traditionnellement, la cérémonie commence avec la mariée au bras de son père, qui ressort au bras de son époux. De plus, elle perd le nom de son père pour celui de son mari (pas au Québec, qui est une société plus féministe et progressiste). Même si Jacques et moi n’avons eu qu’une union civile, même si je n’ai jamais porté son nom, ces symboles du mariage sont trop fort dans notre culture pour que cet acte résume la relation que je partage avec mon amoureux. C’est pourtant moi qui, à l’époque, avais insisté pour que nous mariions...
Je me suis également libérée de quelques kilos en trop (il en reste, soyez rassurés). Lorsqu’on nage avec les masques, surtout lorsque le fond est beau, on n’a pas l’impression de faire des efforts physiques. La musculature de mes jambes et de mes bras prouve le contraire. Tirer sur les cordages ou tourner la manivelle des winchs est également une source de musculation non négligeable, et beaucoup plus intense. Je ne cherche pas à avoir la silhouette d’un mannequin, juste à me sentir bien dans mon corps, ce qui n’était plus le cas.
Les autres étapes de ma libération sont plus progressives, plus difficiles à analyser, impossibles à expliquer. Face à ce sentiment de liberté, car personne ne l’est vraiment, une partie de mes tripes reste prisonnière de l’absence de Malika et Martin. Ils me manquent. Terriblement.
18 août, O'Briens Cay, Exuma Land and Sea Park
Les traversées sont l’occasion pour Sylvain et Gaétan de faire la sieste, de récupérer un peu. Ils ne se couchent pas longtemps avant nous et Gaétan se réveille dès les premières lueurs du jour. C’est aussi l’occasion de jeter nos papiers toilettes usagers... Il y a trop de risque de boucher les poulaines si nous y mettons le papier dedans, et nous n’avons aucune envie de les démonter pour les déboucher. Si nous arrivons à installer les poulaines électriques, peut-être à Saint-Martin, nous pourrons alors débarrasser les salles de bain de leur sac plastique glauque. En attendant...
Il fait nuit noire, j’appelle les gars qui viennent de se coucher après un film. La lune n’est pas encore levée, le ciel est dégagé. Ils sont impressionnés par le nombre des étoiles. Il n’y a pas de ville à proximité. Même si quelques villas isolées sur les îles privées sont éclairées, cela ne suffit pas à éclipser la lumière des étoiles. La Voie lactée est magnifique, je n’ai pas souvent eu l’occasion de la voir si nettement. Le vent suffit à tenir les moustiques éloignés tant que nous sommes sur l’avant. Moment magique.
19 août, O'Briens Cay, Exuma Land and Sea Park
La nuit a été longue... Une première averse nous a réveillés en sursaut. Après 17 jours sans pluie, nous brossons et nettoyons rapidement toute la surface qui sert à remplir les réservoirs, puis le reste du pont. Il y a une croute de sel sur le bateau et du sable fin un peu partout, passagers clandestins de nos chaussures, kites, jouets... Je goûte l’eau vers la fin du circuit, elle est à peu près douce. La pluie a cessé. Nous voyons des éclairs dans quatre directions, mais aucun bruit ne parvient jusqu’à nous. À quelle distance peuvent être ces orages? Aucune idée. Nous nous rendormons. Quelque temps plus tard, nous sommes réveillés par un vent d’orage. Ça souffle vraiment fort, mais nous avons la chance d’être amarrés à la seule bouée de ce cay, aucun souci de décrochage. Par contre, comme l’amarre est relativement courte, ça brasse pas mal. Nous décidons d’enlever les bouchons des réservoirs sans attendre la pluie, car il faut lever les grands couvercles des coffres avant, qui s’ouvrent face au vent. Finalement, il ne pleuvra que quelques minimètres. Nous avons encore de l’eau pour quelques jours, mais guère plus.
Le Sea Aquarium Coral Garden est vraiment impressionnant, même si je le trouve moins harmonieux que le premier récif que nous avons visité à Warderick Wells. Comme ce jardin sous-marin est tout près de notre bouée, mais soumis à un fort courant de marée, nous profitons de l’étale de marée basse pour nous y rendre, il est 8 h 30. L’avantage de se lever tôt est que nous sommes les seuls sur les lieux. Je disais donc que le Sea Aquarium Coral Garden est impressionnant, en particulier pour le nombre de poissons, qui sont curieux et qui n’ont pas peur des nageurs. Pouvez-vous imaginer des centaines de poissons virevoltants tout autour de vous, certains à moins de 10 cm? Nous n’avons pas visité l’aquarium de Nassau, l’un des plus réputés au monde, à cause du prix d’entrée prohibitif du Park Atlantis (140 $ par personne). À long voyage, petit budget. Mais je doute que la sensation soit plus forte qu’ici, dans l’eau, parmi les poissons en pleine liberté.
20 août
Grottes de Rocky Dundas, Exuma Land and Sea Park
Heureusement que l’entrée de chacune des deux grottes est marquée par une bouée d’ancrage pour annexe, car, même à marée basse, on ne pourrait jamais deviner le trésor qui se cache derrière la falaise. Même s’il y a largement la place pour passer, l’entrée est stressante. Les dimensions sont impressionnantes, cela me fait penser à une cathédrale romane, à la fois sobre et qui impose le respect.
Compass Cay
La chaleur écrasante. La végétation ne dépasse pas 2 mètres de haut, suffisant pour couper du vent, mais pas assez pour procurer de l’ombre. Malgré cela, marcher fait du bien. Nous arrivons à la plage côté océan. Selon mes critères, c’est la plage parfaite : déserte, immense, fond sableux exempt de roches, sable débarrassé des algues et autres déchets déposés par les marées. En plus, le soleil qui commence à baisser offre une lumière fantastique. Pour parfaire le tableau, un oiseau nous offre ses trilles mélodieux.
Au retour, nous allons nous baigner au milieu des « pets sharks », des requins-nourrices apprivoisés qui viennent se poser sur un ponton submergé dès qu’ils voient quelqu’un approcher, dans l’espoir de recevoir des caresses. Je ne pense pas que j’aurais été capable de m’immerger complètement dans cette eau au début de notre voyage, mais nous avons croisé de nombreux requins-nourrices lors de nos mouillages et nous avons maintenant beaucoup moins d’appréhension face à ces poissons qui s’intéressent aux hommes uniquement parce qu’ils balancent des restes de poissons par-dessus bord. Il faut croire que j’ai moins peur des requins que des chiens... Il faut dire qu’aucun requin ne m’a encore aboyé après.
21 août, Staniel Cay
Nous sommes dans Hard-Grotto, la grotte rendue célèbre par Hollywood, en particulier par un des James Bond. Bien que nous soyons à mi-marée, nous pénétrons sans difficulté dans le lieu. Nous ne sommes plus sans le parc, mais la pêche est interdite dans ce haut lieu touristique et les poissons, toujours aussi curieux, nous tournent autour. La grotte n’est pas très grande et très différente de celles de Rocky
Dundas. Il y a plusieurs entrées, donc plusieurs sources de lumière même si peu sont à l’air libre avec ce niveau de marée, en plus du puits au plafond. Il n’y a pas de stalactites et le fond de la grotte, bas de plafonds, est quasiment dans le noir. Pour le plaisir, je ressors par un des tunnels souterrains. D’accord, j’exagère un peu. Le courage n’est pas ma plus grande qualité. Le « boyau » fait 50 cm de fond, à 30 cm sous la surface de l’eau...
Staniel Cay est la plus jolie ville (ou plutôt village) que nous avons visitée jusqu’à présent. Ici, pas de bâtiments en ruine, mais de nombreux chantiers en cours. Les maisons sont colorées, la végétation est très variée. Tout est propre. Malheureusement, la dépression (qui n’est pas encore une tempête) va passer sur les Bahamas. Nous partirons donc demain pour une marina près de Georgetown, à 45 milles d’ici. Nous n’avons même pas vu les cochons nageurs, il faudra revenir.
22 août, en route pour Great Exuma Island
Nous nous sommes levés avant le soleil, le vent devrait forcir en après-midi et nous avons une longue route à faire. Nous levons l’ancre avant même de déjeuner. Les muffins préparés la veille feront un excellent déjeuner en route. Nous sommes maintenant suffisamment éloignés de la côte pour mettre les voiles. Oh non! La drisse de la grand-voile s’est enroulée autour du phare au milieu du mat et y est bien coincée. Malgré la houle assez forte, Jacques grimpe comme il peut sur la base du mat, jusqu’au-dessus des winchs. Ça ne suffit pas. Il monte plus haut, sur la bôme, la gaffe à la main. Pendant ce temps, je fais tourner le bateau pour que le vent décroche le cordage. Ouf! Le cordage est enfin décroché. Nous pouvons monter la voile. Le reste du trajet se passe sans incident. Le vent vient bien de la direction prévue, nous naviguons au près serré, mais nous n’avons pas besoin de faire des bords. Nous pêcherons un petit barracuda, ce qui est mieux qu’un gros, car il a moins eu de temps pour accumuler mercure et ciguatera. En fin d’après-midi, le vent devient plus fort. Nous prenons un ris sur la grand-voile puis sur le génois.
Arrivée à la marina d’Emerald Bay, nous ne comprenons absolument rien de ce que nous dit le chef de quai. Heureusement que Jean-Pierre est là, il nous servira d’interprète. C’est notre première escale dans une marina. L’arrivée est assez épique, mais je lance les amarres sans fausses notes. La marina est luxueuse, malgré un prix très attractif (1 $/pied, sans électricité), à cause de l’entrée assez difficile par vent fort. La lingerie est gratuite, ainsi que le prêt de DVD et la salle de billard. Lessive et ménage seront donc à l’emploi du temps des deux prochains jours, en attendant que la dépression nous dépasse. Jean-Pierre et Jacques se retrouvent avec plaisir. Nous passons une excellente soirée, un peu trop arrosée, à bavarder de différents sujets. Jean-Pierre est mécanicien pour Navtour, une compagnie québécoise de location de bateau. C’était le capitaine lors du dernier convoyage de Jacques, du lac Champlain à Navtour. Il est venu une semaine pour « été-erniser » son voilier.
23 août, Emerald Bay Marina, Great Exuma Island
Petite partie de billard matinale. Les garçons apprennent vite et ont beaucoup de plaisir. Nous sommes prêts à affronter le mauvais temps. Nous ne sommes pas vraiment dans un trou, mais bien abrités des vagues et amarrés sur les deux côtés. Cette marina a des quais flottants partout, avec de hauts poteaux. Durant un ouragan, le niveau de la mer peut monter de plusieurs mètres! Mais ce qui arrive n’est pas un ouragan, même pas une dépression tropicale. Juste un système avec plein d’orages, de fortes pluies et du vent jusqu’à 35 nœuds. La pleine saison des ouragans ne fait que commencer. Nous devrons réfléchir à notre programme d’ici fin septembre, car la fréquence des alertes devrait s’accentuer durant les 6 prochaines semaines.
24 août, Emerald Bay Marina,
Great Exuma Island
Je pourrais vous raconter le plaisir que je prends à lessiver les cabines du sol, toute dégoulinante de sueur, asphyxiée par les vapeurs de savon-noir, une averse m’ayant obligée à fermer tous les hublots. Mais comme cela n’aurait aucun intérêt, je ne vous le raconterai pas.
25 août, en route vers George Town, Great Exuma Island
Nous quittons la marina de Emerald Bay, les réservoirs d’essence et d’eau pleins. Malgré la tempête tropicale Cristobal qui est passée un peu à l’est, nous n’avons pratiquement pas eu de pluie ni de vent fort. Nous sommes donc soulagés d’avoir fait le plein d’eau. Nous y retournerons peut-être bientôt, puisqu’un nouveau système se développe et se dirige
vers ici.
La houle est forte, mais assez longue. Pour une fois, nous avons le vent dans le dos, les vagues viennent de trois quarts arrière. Au lieu de taper, le bateau surfe sur les vagues; la vitesse passe de 5 à 7 nœuds! Le Chantemer bouge dans tous les sens, mais en douceur, c’est agréable comme un hamac qui bougerait dans les trois dimensions.
26 août, George Town, Great Exuma Island
J’ai mal aux doigts! Vraiment mal! Tenir encore quelques minutes... Je joue de la guitare, pour la deuxième journée d’affilée, pour la quatrième ou cinquième fois depuis le départ. Pas de quoi progresser, seulement de quoi arrêter de perdre ce que j’avais durement acquis depuis Noël dernier. Moi qui pensais naïvement que j’aurais enfin du temps sur le bateau. Si je veux jouer de la guitare, je dois en faire une priorité. Je n’ai même pas encore déballé mon ensemble d’aquarelle... L’école commence dans quelques jours, ce sera donc bien pire dès la semaine prochaine. Voici ce que m’a écrit Serge Charbonneau, l’auteur de Mille jours (voir la colonne de gauche sur la page d’accueil). « On voudrait avoir une vie longue, mais on l’aime pleine et trépidante! Lorsqu’elle est ainsi, elle devient trop courte... » Cette pensée me console. Merci Serge, pour ton livre et tes encouragements.
27 août, George Town, Great Exuma Island
Les Legos... Ce fut de longues discussions avec Jacques, de longs moments de réflexions personnelles pour trouver la meilleure façon de les ranger, et de longues heures de triage pour Sylvain. À la maison, nous étions passés d’un tri excessif dans des cases à vis à tout mettre en vrac dans un large tiroir sous le lit. Finalement, j’ai acheté 4 blocs de 3 tiroirs format lettre, cela fait 12 critères de rangement, ce qui est gérable. La taille des casiers permet de trouver LA pièce. Les tiroirs se verrouillent par un élastique que j’ai ajouté. Les blocs restent dans la cabine de Sylvain, au bout de son lit. Bien sûr, même s’ils n’ont pas le droit de faire des Legos en dehors de la couchette, les constructions finissent par en sortir, par se casser, et nous retrouvons des morceaux en peu partout, en particulier sous nos pieds nus (aïe!). Les Legos restent une activité dont ils ne se lassent pas, qui font travailler leur imagination et leur vision dans l’espace. Les constructions ouvrent chaque fois un nouvel univers de jeux. Nous avons donc bien fait de les amener, même s’il faut toujours se battre pour qu’ils soient rangés. La variété des activités sur le bateau étant limité, Gaétan joue beaucoup plus aux Legos qu’à la maison et Sylvain lit plusieurs heures par jour, même s’il est encore loin derrière son petit frère pour la vitesse et la durée. Je suis vraiment fière d’eux!
28 août, Stocking Island
Jacques veut faire du kite. Il est 15 h, le soleil tape dur. Le vent est limite, la plage mal orientée... Je prépare mes affaires : un livre, un peu de couture, mon parasol, ma musique... Premier départ : visiblement ça ne va pas bien. Je l’attends debout sur la plage pendant qu’il s’acharne. Après son retour, nous faisons une jolie promenade jusqu’à l’autre bout de l’île, côté océan. Les vagues se déchainent sur une caverne profonde, c’est impressionnant. Retour à la plage, où était resté Gaétan. On rentre? Non, on se baigne. Sauf que moi, la baignade, ça va 20 minutes, ou alors il faut que j’aie un but : un point à atteindre, des coraux à regarder, etc. Jacques me suggère d’aller lire. Bien, mais je serais beaucoup mieux sur le bateau, dans mon hamac, par exemple. Le temps passe, Jacques retente un départ, sans plus de réussite. Finalement nous rentrons au Chantemer, 2 h 30 après notre départ. Jacques n’a pas fait de kite et moi je n’ai pas fait grand-chose... Ils annoncent du bon vent pour les deux prochains jours, il va falloir que je me montre patiente et compréhensive... Parce qu’en plus, je n’ai pas le droit de râler.
29 août
Stocking Island
Nous sommes vendredi. La rentrée, c’est pour lundi, la panique commence à m’envahir. Les affaires sont relativement toutes rangées maintenant. Le ménage a été fait dans les espaces de rangement en arrière de la banquette : manuels, cahiers et crayons ont trouvé leur place. Il me reste deux jours pour me replonger dans le programme, essayer de faire un emploi du temps, séparer les activités sur l’ordinateur, celles où je devrais participer activement et celles qu’ils pourront faire tout seul. Le stress monte... D’un autre côté, Sylvain et Gaétan ont gagné en autonomie durant ces deux premiers mois de voyage. Ils lisent plusieurs heures par jour, et n’ont aucune difficulté d’apprentissage. Je suis certaine que même si nous n’avions aucune activité scolaire durant l’année, ils n’auraient que peu de retard par rapport à la moyenne de leur classe et beaucoup plus de culture générale.
Plage entre Three Sisters Rocks et Ocean Bight, Great Exuma Island
Cette fois-ci nous avons choisi notre ancrage face à une plage qui offre une exposition parfaite aux alizés sans aucun obstacle pour perturber Éole. Sauf que... il n’y a pas non plus d’obstacle à la houle... Qu’à cela ne tienne! Nous embarquons, bon an mal an, les kites, les planches, les appareils photo, les livres, les enfants, etc. Direction : la plage pour tout le monde! Le départ est épique, l’atterrissage catastrophique. La force des vagues déferlantes nous surprend. Alors que je suis accroupie à l’avant de l’annexe, prête à sauter à l’eau pour conduire le canot sur la plage, l’arrière de bateau est brutalement surélevé. Je suis projetée vers l’avant. Je m’attends à recevoir le zodiaque à fond rigide sur la tête, mais non. Je me relève, me retourne et constate que Jacques et Sylvain sont également tombés. La barque est pleine d’eau, mais toutes les affaires y sont. La caisse, qui contient toutes les affaires sensibles à l’eau, flotte avec son couvercle toujours verrouillé dessus. D’autres vagues arrivent. C’est fou ce qu’on peut noter comme détails en quelques fractions de seconde. J’attrape la corde à l’avant, je tire la barque de toutes mes forces sur la plage, aidée par Jacques. Gaétan est descendu et sort de l’eau. Il pleure de douleur, mais s’il est sorti tout seul et qu’il est debout, c’est qu’il n’est pas gravement blessé. Je lui demande de s’asseoir en attendant que je vienne m’occuper de lui. La priorité et de sécuriser l’annexe, qui se remplie un peu plus à chaque vague. Heureusement, nous avons réussi à la tirer suffisamment pour retirer le bouchon et lui permettre de se vider en partie, ce qui nous permet de la hisser hors
d’atteinte des vagues en furie.
Jacques gonfle son kite, les garçons oublient peur et douleur pour s’éclater dans les vagues. Jacques revient après une séance de kite écourtée, il n’a pas pris la bonne taille de voile... Moi, je n’arrive pas à profiter de cette plage magnifique ni à m’amuser dans les vagues. L’angoisse du retour ne me lâche pas. Comme à mon habitude, je ne cède pas au désespoir et je me mets en mode solution. Toutes les idées sont analysées. Tirer l’annexe jusqu’au bout de la plage en espérant que les rochers réduisent un peu les vagues? Non. Le bateau ne peut être tiré que dans de l’eau où l’on a pied, c’est-à-dire en plein dans les déferlantes. Rentrer à la nage et laisser les affaires sur la plage en attendant? En attend quoi??? Ils annoncent du vent à 20 nœuds pour les deux jours à venir, puis à 15 nœuds par la suite, toujours de l’est. La seule solution est que je tire l’annexe face aux vagues, pour l’empêcher de se mettre de travers, pendant que Jacques est au moteur. Même s’il est plus grand est plus fort que moi, ce qui sont deux avantages importants pour tenir face aux vagues, il est surtout beaucoup plus habile que moi au moteur et il ne paniquera pas en cas de manœuvre d’urgence. Sur l’idée de Jacques, nous programmons deux voyages. Le premier trajet a pour objectif de ramener les enfants en sécurité à bord du Chantemer, ils pourront alors nous aider à débarquer les affaires. Jacques revient au plus près des déferlantes, j’emmène les affaires une à une, le plus loin possible que me permettent la profondeur et la hauteur des vagues. Jacques lâche le moteur un bref instant, il attrape ce que je lui tends. Je n’ai plus pied dans la crête des vagues. Il rattrape le moteur, fait un demi-tour impressionnant tout en accélérant, ce qui lui permet d’échapper à une vague plus grosse que les autres. Après quelques aller-retour, il ne reste plus que la grosse caisse en plastique, assez lourde. Heureusement, même si elle n’est pas étanche le couvercle tient bien. La boîte flotte, je n’ai qu’à la pousser. Une fois à bord, Jacques repart. Je préfère rentrer à la nage. Une fois les brisants dépassés, la houle n’est pas un problème est le Chantemer n’est pas très loin. Cela me parait moins dangereux que d’essayer de monter à bord ou de me faire tirer. Surtout, cela me permettra d’évacuer une partie de stress.
Nous avons fait preuve de manque d’expérience, c’est certain. La seule perte matérielle est ma paire de lunettes de soleil, achetée quelques jours auparavant, pour remplacer celle que j’avais oubliée sur ma tête avant de me baigner. C’est surtout embêtant pour l’environnement. Nous nous en sortirons avec quelques bleus et une belle frousse, un peu traumatisant pour les gars. Pour ne pas rester sur les lieux, nous rejoignons Emerald Bay, mais au mouillage, pas à la marina. Un bon film : Qui veut la peau de Roger le lapin? nous permettra de penser à autre chose avant de nous coucher.
30 août, Great Exuma Island
Emerald Bay est abritée de la houle au sud de la plage. Nous y débarquons, avec le kite, les planches et tout le tralala. Nous échangeons quelques civilités en anglais avec des promeneurs avant de nous apercevoir que nous sommes tous les quatre francophones. Ce n’est pas la première fois que cela nous arrive dans les Bahamas, et c’est très courant dans l’ouest de l’île de Montréal. C’est un couple sympathique, qui vient du nord du Québec. Des Québécois comme nous : aucun des deux n’est né au Canada. C’est intéressant de voir le nombre de Québécois immigrants qui voyagent et qui participent au rayonnement de la belle province. Tous ceux que j’ai rencontrés se définissent avant tout comme des Québécois, tout comme nous. J’ai raté un épisode, ils reviennent avec de la pizza! Nous les invitons à souper sur le Chantemer. Au cours d’une soirée très agréable, ils nous disent qu’ils sont tous deux médecins. « Au Centre de santé Tulattavik de l’Ungava? » Ils sont surpris que je connaisse le nom de cet établissement. Hé oui, nous avons une connaissance commune. Nous sommes à des milliers de kilomètres du Québec, nous résidons à deux extrémités de la province, mais nous connaissons tous deux Marie-Josée Gagnon, une sage-femme qui déploie énormément d’énergie pour développer les services de sage-femme à Kuujjuaq. C’est intéressant d’entendre leur discours sur la collaboration exemplaire qu’il y a entre les médecins et les sages-femmes là-bas. Il fait échos à ce que Marie-Josée rapportait au RSFQ, l’association professionnelle des sages-femmes pour laquelle je travaillais ces trois dernières années. Ce modèle est-il exportable?
31 août, Hamlet Cay
Mais où sont les conques? J’avais compris qu’il suffisait de mettre la tête dans l’eau pour en trouver. Visiblement, ce n’est pas si facile. Nous trouvons de temps en temps quelques jeunes coquillages qui n’ont pas le développement requis pour être pêché. Dommage, j’aime vraiment ça et j’ai hâte d’essayer de faire mes propres « conches fries ».